TTR : traduction, terminologie, rédaction, 2(12), p. 131
DOI: 10.7202/037376ar
Résumé Le don et l'abandon : la trace de la traduction dans la blanche écriture du concept — Cette étude met en question l'ascendant du concept dans le domaine de l'expression ou, plus généralement, celui des « arts du sens ». L'impossibilité qui frappe la nécessité même de la traduction comme vecteur de la signification, loin de l'aliéner, l'instruit plutôt comme agent créateur d'une dimension de sens dont l'ouverture, virtuellement infinie, est intimement liée à la finitude qui s'attache au partage de la condition humaine. C'est là la limite du concept et le plan de démarcation de toute poétique en regard de la normativité inhérente à l'exercice du langage. C'est aussi la frontière qu'explore la traduction, qui ne saurait alors être reléguée à une fonction ancillaire en vertu de laquelle il lui incomberait simplement de préserver l'univocité du signifié (concept) commandant la translation idyllique entre une langue-source et une langue-cible. La traduction est par essence « performative », c'est-à-dire qu'elle produit du sens. Ainsi fait-elle brèche vers une dimension d'universalité qui n'est pas d'abord subordonnée à l'unité du concept, mais se ressource et trouve son épanouissement dans l'unicité de la forme, celle d'une langue dont l'incomplétude est non seulement avérée, mais sollicitée dans son rapport à l'étranger. Il ne lui appartient pas de communiquer quelque chose, mais de révéler l'essence même de la communicabilité.